Les chemins de l’incroyable

Les chemins de l’incroyable

2022-11-11 2 Par Éric Laliberté

Il y a de l’incroyable sur les chemins pèlerins. Des moments qui laissent dans la béance de l’étonnement face au vide de l’improbable et qui renversent nos représentations du monde. Le commun des mortels s’étonne : « Ça, je ne l’aurais jamais cru! » Mais de quoi est fait cet incroyable? De quoi s’étonne-t-on avec autant de fracas sur les chemins de pèlerinage?

Aussi étrange que cela puisse paraître, l’incroyable du chemin est fait de générosité, d’accueil, d’écoute, de réconfort, de bonté, de partage. Ce sont précisément ces représentations du monde qui relèvent de l’incroyable.

Par définition, l’incroyable correspond à ce qui ne se croit pas. C’est donc dire que nous n’aurions jamais cru les gens aussi bons, généreux, accueillants… Par ailleurs, l’incroyable implique la possibilité d’un croire. S’il y a de l’incroyable, c’est qu’il y a du croyable quelque part! Or si l’incroyable se situe du côté de la bonté, en quoi je crois? C’est troublant quand on s’y arrête.

L’incroyable pose ainsi la question des croyances et par conséquent de ce qui constitue nos représentations du monde. De quoi est fait ce monde auquel j’adhère, auquel je crois? Est-ce qu’il correspond effectivement à ce que j’espère de la vie où n’est-il que le reflet de ma désillusion?

Croire, c’est espérer. Jamais installé, toujours devant, croire implique de chercher, de se mettre en mouvement. Un mouvement qui pointe vers un horizon auquel j’adhère, auquel je crois. Marcheriez-vous en direction d’un monde qui s’effondre? Vers votre autodestruction avec conviction? Je ne crois pas.

Ainsi, même si l’on dit croire que le monde s’en va à sa perte, ce n’est pas l’orientation que nous souhaitons pour nos vies. Si cette conception relève du croire, il s’agit davantage d’une fausse croyance. Car ce que je crois sincèrement, au fond de moi, même dans les moments les plus sombre, espère toujours le meilleur, le beau, le bon. Non seulement pour moi, mais pour mon entourage. Ce que je crois me traverse et me dépasse par sa grandeur.

Le croyable relève de l’à-venir. Jamais possédé, il échappe par l’élan qu’il suscite. Toujours en progrès, il devance et attire comme un doux parfum qui indique la route à suivre : je le sens.

La vie des chemins pèlerins est faite de la simplicité de ce mouvement; une simplicité si grande qu’elle en est désarmante, « incroyable ». Pourtant, cet incroyable parle avec force du désir que je porte : celui de croire dans un monde meilleur.

Éric Laliberté