Un grain de folie

Un grain de folie

2019-01-11 3 Par Brigitte Harouni

J’ai l’air de plaisanter, mais je ne rigole pas du tout,

être une fois cinglé, une fois vraiment fou!

Michel Sardou

C’est le premier pas qui est le plus difficile à faire. C’est ce pas qui vous met en mouvement, celui qui vous sort de cet immobilisme qui commençait à vous sembler engourdissant, cette léthargie devenue ennuyante. Partir en pèlerinage, c’est sortir des sentiers battus pour vivre en marge d’un monde où tout bouge trop vite sans pour autant aller quelque part. Partir parcourir 800 kilomètres… à pied… avec un sac à dos !? Mais quelle folie!

Nous avons tous un petit grain de folie au creux de notre poche que nous tâtons du bout des doigts sans oser le mettre en terre; Cette décision, un peu folle, qui pourtant nous semble être la bonne voie à suivre.

Se séparer pour vivre avec un conjoint 15 ans plus jeune que soi / avoir un septième enfant / tout vendre pour partir avec la famille faire le tour du monde pendant un an / quitter, après 17 ans de service, sa situation d’ingénieur informatique pour devenir céramiste / à 25 ans, quitter sa famille et son pays pour épouser un coup de foudre rencontré en Écosse / Vendre la confortable maison familiale pour s’installer dans un condo au centre-ville / à 67 ans, s’engager dans un programme d’aide humanitaire au Burkina Faso / Acheter un vignoble! …

Petite folie ou grande folie, sortir de la masse c’est accepter que nous sommes tous différents et choisir d’afficher la nôtre. Sortir de cet espace convenu de tous, quitter le troupeau, c’est oser se respecter et s’écouter. Aller à contrecourant demande de l’audace, du courage.

C’est ma route. Ce n’est peut-être pas la bonne, mais c’est la mienne, celle que je choisis, celle qui me rend heureux. Qui d’autre que moi est apte à en juger?

Ce premier pas n’est pas que le plus difficile, il est aussi le plus long. Se laisser guider par cette boussole sensorielle intérieure n’est pas une tâche des plus faciles; nous qui sommes habitués, éduqués, conditionnés, à aborder notre vie avec notre tête, à la rationaliser. Une approche cartésienne à une réalité émotive! Il faut parfois que le malaise devienne trop grand, que l’inconfort nous envahisse, que le corps commence à crier qu’il est mal, qu’il a mal, pour que l’on se mette en marche. Après un temps interminable passé à surmonter les doutes et les peurs, on se laisse porter par ce grain de folie vers ce désir qui nous tenaille tant.

Ce changement demande d’avoir un sac bien préparé. Pour bien vivre cette transformation et arriver à bon terme, pour que ce grain de folie que nous nous apprêtons à planter puisse prendre racine, germer et porter fruit, plusieurs ingrédients sont nécessaires.

  • De la conviction, pour faire face à la pluie de découragements qui risque de s’abattre sur soi.
  • De la détermination, pour affronter les vents des « qu’en-dira-t-on » qui souffleront sournoisement.
  • De la persévérance, pour arroser et nourrir chaque jour un peu plus ce plan un peu fou.
  • De la patience, pour laisser au temps le temps de faire son œuvre.
  • De l’amour, pour éloigner les éléments nuisibles qui pourraient saper les jeunes pousses.

Michel Foucault disait : « De l’homme à l’homme vrai, le chemin passe par l’homme fou. » Et si c’était ça Compostelle, quelques fous sur un chemin de transition? Et vous, quelle folie mettrait de la vie sur votre route? Et si vous osiez…?

Brigitte Harouni