Prendre le risque de vivre

2016-02-05 2 Par Éric Laliberté
« La vie est périlleuse. »
Richard Bergeron, La Vie à tout prix!
Chaque matin, nous sommes des milliards à braver le seuil de notre porte pour risquer notre vie. Que ce soit pour nous aventurer dans le métro, au volant de notre voiture, en dévalant une pente de ski, en roulant à bicyclette, en traversant la rue ou simplement en brandissant notre cellulaire : le moindre geste est un risque. Même mettre un pied devant l’autre peut devenir périlleux par les temps qui courent! La vie est périlleuse à bien des égards dans le banal de notre quotidien. Et pourtant, chaque jour, nous risquons nos vies pour toutes ces banalités.

Vivre demande du courage, de l’audace. Pourtant, et malgré toute l’audace qu’exige notre quotidien, bon nombre de gens s’enferment dans un monde aseptisé par crainte d’être blessé, de souffrir, voire de mourir. Saut de joieComme si l’effort de vivre était surhumain! Vivre est humain. Mourir aussi… La vie est périlleuse : on en meurt tous! Avons-nous seulement la force de vivre notre vie, la nôtre? Celle à laquelle nous sommes appelés?

Supposons que vous n’avez jamais mangé de fraise et ne savez pas si vous y êtes allergique. Si l’on vous offrait de choisir entre manger une vraie fraise et en faire l’expérience à travers une saveur artificielle qui évite tout risque d’allergie, que choisiriez-vous? La question peut vous sembler ridicule, mais elle ne l’est pas. Au contraire, elle est très réaliste. Plusieurs personnes seraient tentées de choisir la saveur artificielle pour ne pas prendre le risque. Maintenant, si je vous demande que préférez-vous : une vie vécue sur écran plat HD 54 pouces ou prendre le risque de vivre votre vie par vous-même? Là encore, la réponse pourrait être triste à mourir…

Certes, la vie exige un effort. Mais, avoir le courage de risquer sa vie demande à chacun l’effort qui convient : qu’est-ce que faire un effort quand on aime ce que l’on fait? Chacun sait où il devient risqué pour lui de vivre. connaissons assez bien nos failles et nos carapaces. Chacun sait ce qu’il doit dépasser pour être en cohérence avec la force intuitive qui l’habite et qui n’a rien à foutre des qu’en dira-t-on, des conditionnements, de toutes illusions sur la prestation d’une vie bien remplie.

randonneurPour risquer la vie, avons-nous le courage d’être là où elle nous appelle? Avons-nous le courage d’être spontané? Le courage de défaire nos plans si bien ordonnés pour écouter cette intuition qui monte? Le courage de refuser la bonne offre parce qu’elle ne correspond pas à nos valeurs? Le courage de remettre en question notre manière de vivre? Le courage de perdre quand cela est nécessaire? Le courage d’être ridicule? Le courage de ne pas être toujours à la hauteur? Le courage d’être vulnérable? Le courage de ses talents, de ses qualités? Le courage d’assumer ses erreurs? Le courage de bouger lorsque sa vie devient léthargie? Le courage de ne pas briller? Le courage de s’observer avec sincérité? Le courage d’être transformé? Le courage de se laisser déranger, bousculer dans ses certitudes?

Ce n’est pas sans risque que le saumon remonte la rivière. Pourtant, c’est tout le sens de sa vie qui se joue à travers cette lutte à contre-courant. Chaque jour de cette aventure en rivière, le saumon se démène pour remonter jusqu’à sa source. Ne faisant qu’écouter l’appel qui résonne au plus profond de lui, il avance, car il est dans sa nature de répondre à cet appel et de tout mettre en œuvre pour y arriver… jusqu’à en mourir.

L’être humain qui se résout à risquer sa vie, comme le saumon, se résout à retrouver sa source, sa véritable nature, pour vivre en cohérence avec celle-ci. Vivre en cohérence avec cet élan demande donc le courage de se visiter dans ses profondeurs. Mais, celui ou celle qui s’y risque s’engage aussi dans une folle aventure : celle de goûter la vie à chaque instant, dès maintenant; une vie qui s’invente à tout moment. En prenant le risque de vivre, on devient de plus en plus libre, de plus en plus vivant. Alors, seulement, la mort ne nous effraie plus.Bottes et Vélo - Emblême

Éric Laliberté