Plus je marche, plus je suis

Plus je marche, plus je suis

2018-10-12 0 Par Brigitte Harouni
Changer n’est pas devenir quelqu’un d’autre, c’est devenir qui on est et l’accepter.
Jacques Salomé

Afin de pouvoir déterminer clairement ce « où vais-je » dans ma vie, afin d’être sensible aux signes qui donnent une orientation à mes choix, pour bien saisir l’essence de mon sanctuaire, cet espace vers lequel j’avance dans la vie, promesse de mieux-être, lieu d’épanouissement qui m’est fait sur mesure, il m’importe de savoir me regarder telle que je suis réellement. Un exercice de franchise envers soi-même qui n’est pas toujours facile à réaliser. Qui suis-je vraiment?

Qui suis-je quand je m’épluche et que je retire une à une toutes ces couches d’influence qui grandissent avec moi et m’habillent? Quand je me présente, que dis-je de moi en premier? Est-ce mon travail, ma profession que je mets de l’avant? Et si j’avais un autre emploi, serais-je toujours la même? Et si je ne travaille pas, si je suis à la retraite, mère au foyer, en arrêt de maladie ou au chômage, ne suis-je que cela? Certaines personnes se définissent par leurs possessions : ma voiture, ma maison, mon vélo, mes vêtements reflètent-ils vraiment celle que je suis? Sont-ils le reflet des influences de la mode ou de l’image que je désire projeter? Ne serais-je pas plus que ces accessoires d’apparat? Qui se cache sous ce costume? Je peux aussi me définir en fonction d’un trait de personnalité qui me caractérise : patiente, organisée, serviable, …. des caractéristiques assez communes et qui sont certainement restreignantes. Je suis assurément plus que ça!

Toutes ces définitions de moi viennent confiner celle que je suis vraiment. Elles m’emprisonnent dans des cases convenues. Cependant, elles me donnent accès à un certain prestige, à une image valorisée et valorisante. Dans la course à la perfection et à la compétition de notre société moderne, cette image dont je m’affuble fièrement, me confère un certain statut, une certaine valeur. Nous évoluons dans un environnement qui nous laisse croire que nous ne sommes jamais assez. Pas assez intelligente, pas assez mince, pas assez riche, pas assez débrouillarde… La définition que nous nous donnons de nous-mêmes, cette image que l’on s’est confectionnée, met un baume sur ce « pas assez » en nous offrant de la reconnaissance sociale, de la reconnaissance aux yeux de cet autre, de mes parents et de mes amis. Elle me sert, tout en me nuisant, car elle n’est pas moi et donc par le fait même, m’empêche de le devenir pleinement.

Sur le chemin de pèlerinage, plusieurs masques tombent rapidement. Pour tout pèlerin que je rencontre, mon métier n’est d’aucun intérêt. Mes possessions sont loin de moi. Dépouillée de mes parures, sans maquillage et sans parfum, tel un jeu de poupées russes, mes personnages se défont et je m’ouvre de plus en plus, jusqu’à me rapprocher de l’essence même de mon être authentique. La plus petite des poupées russes. Comme l’eau trouble qui s’éclaircit quand on cesse de l’agiter, mon esprit s’apaise et voit plus clair grâce au vide généré par ma marche. Entourée d’inconnus, acceptée telle que je suis, le corps fatiguée et l’esprit léger, je tends à me rapprocher le plus possible d’être simplement moi.

Il faut du courage, de l’audace et parfois un brin de folie pour oser ainsi afficher sa vraie couleur, et surmonter sa crainte des commentaires et du jugement. Il faut savoir atteindre cet état d’acceptation de qui on est, avec nos forces et nos imperfections. Un processus qui demande de l’humilité, de l’amour et de l’accueil. Il faut apprendre à accepter tout ce que nous sommes réellement, atteindre ce niveau de confiance en soi et en la vie, où le regard de l’autre n’a plus d’emprise sur qui je suis. Une libération qui permet d’avancer sur une route qui me ressemble pleinement. C’est ma route. C’est la bonne pour moi!

Brigitte Harouni