Le coming out du pèlerin
Quand nous perdons le droit d’être différents, nous perdons le privilège d’être libres.
Nelson Mandela
En lisant tout récemment un article dans le journal, Le placard de Vincent, je suis restée accrochée à la dernière phrase : « Un coming out, soutient Vincent (Mercier), c’est d’abord et avant tout reconnaitre, accepter et aimer qui on est vraiment ». Reconnaitre, accepter et aimer qui on est vraiment…
On a tendance à penser que le coming out est réservé au dévoilement d’une situation concernant l’orientation sexuelle d’un individu. Pourtant, par extension, cette expression est de plus en plus employée pour désigner toute annonce publique d’une caractéristique personnelle jusqu’alors tenue cachée ou secrète.
Si le coming out existe, s’il se vit, c’est que la pression contraire est présente : l’enfermement, l’étouffement. L’être humain, complexe machine en constante évolution, grandit dans un environnement qui paradoxalement incite à un certain conformisme, à un respect de règles statiques entendues et convenues. Pour diverses raisons personnelles, chacun de nous retient intérieurement un élan ou un désir de changement, qu’il soit grand ou petit. Peur du rejet ou du jugement, des « qu’en dira-t-on ». Peur de s’afficher. Et on ne parle pas ici d’orientation sexuelle. Avoir les cheveux mauves, vivre dans une mini-maison, être père au foyer, avoir un conjoint nettement plus jeune que soi, … Bien des décisions sont refoulées, reléguées au fond de notre placard par crainte du regard de l’autre.
En pèlerinage, loin de tous ceux qui nous apposent une identité, et nous imposent une marche à suivre, loin des règles inventées, des conventions, des traditions, des pressions sociales, du paraitre et du devoir, déconnecté de sa routine de vie quotidienne, le pèlerin vit le privilège d’être libre. Libre de tous ces enchainements. Libre de choisir. Libre d’être tel qu’il le souhaite. Le temps de cet exil est un temps de gestation. Un temps de franchise envers soi-même. Des changements s’opèrent. Des décisions se prennent. Au retour, plusieurs pèlerins vivent un coming out. Après avoir goûté, pendant plusieurs jours, à ce vivre autrement avec soi-même, la vérité sort du sac… Certains rôles devront dorénavant changer, certains masques vont tomber, certaines pressions devront disparaitre.
C’est l’inconfort, le sentiment d’étouffer, d’être enfermé dans un carcan qui met le pèlerin en marche, qui sonne le signal du départ. Mais c’est le retour, après toutes les heures solitaires en tête-à-tête, après le plaisir de goûter la liberté de mouvement, le bonheur de respirer librement, que le pèlerin, prêt à s’accepter dans sa marginalité et sa différence, trouve la force de faire son coming out. Confiant, il choisit d’afficher ses couleurs.
… et aimer qui on est vraiment.
Que contient votre placard? Quelle décision repoussez-vous de jour en jour, de mois en mois, … d’année en année… ? Qu’est-ce qui vous retient de passer à l’action? « Dans la vie, on a toujours le choix : aimer ou détester, assumer ou s’enfuir, avouer ou mentir, être soi-même ou faire semblant » (Nelson Mandela).