Résonner pour mieux raisonner
La vie est un mystère qu’il faut vivre, et non un problème à résoudre.
Gandhi
Sur le chemin de la vie, le pèlerin avance, en quête de son sanctuaire, à la recherche de ce qu’il désire vivre pour être heureux. Cette route qui se fond dans la brume à l’horizon, s’éclaircit au fur et à mesure qu’il avance. Parfois, ses pas le mènent à des intersections. Le pèlerin doit alors prendre quelques minutes pour s’arrêter et se référer à sa carte, ce plan de vie qu’il a élaboré consciencieusement au fil du temps. Puis il consulte aussi sa boussole intérieure pour s’assurer qu’elle pointe encore dans la direction qu’il s’était fixée. Ainsi va sa route; la tête et le cœur, travaillant de concert, s’accordant pour avancer en harmonie.
D’autre fois, cependant, le pèlerin de vie se retrouve à la rencontre de plusieurs chemins, sur un carrefour giratoire important. De tels carrefours, nous en croiserons quelques-uns au cours de notre vie. Ils marquent un moment charnière de notre existence : orientation scolaire à prendre à la fin du secondaire, décision d’unir sa vie à un amour que l’on veut éternel, choix d’avoir un enfant, lettre de démission que l’on remet après plusieurs années de service pour pouvoir réaliser un autre rêve,… Ces moments, marquent des carrefours décisifs dans notre parcours de vie. Ils représentent un embranchement crucial qui me distinguera par la suite des autres Moi que j’aurais pu devenir. Une telle décision ne se prendra pas en quelques jours. Le pèlerin de vie peut faire plusieurs tours dans ce rond-point, à considérer et reconsidérer toutes ces avenues. Mais rien ne presse. Un temps de gestation est essentiel à la maturation de cette décision. Tout comme la poire a besoin de temps pour devenir sucrée et juteuse, il faudra un temps pour mûrir la suite du parcours pour qu’il nous soit savoureux.
C’est en se mettant à l’écoute de son milieu, en se laissant traverser par ce qui vibre à l’extérieur, que le pèlerin s’éveille aux prémisses d’une réponse.Tout comme le phénomène de résonance des sons, la projection de chaque Moi-futur possible engendré par chacune des avenues génère une vibration qui vient toucher le pèlerin de vie. Le pèlerin, telle une caisse de résonance, reçoit cette vibration et prend conscience de ce qu’elle active en lui, de la façon qu’elle résonne en lui. C’est à partir de cette information invisible perçue par les sens, et du ressenti qui en a émergé dans le corps que la direction de la route à suivre prendra forme. Si le pèlerin vibre au diapason avec ce que l’extérieur lui propose, c’est qu’il est sur la bonne voie. Il est alors en accord avec la décision.
De ce « résonnement » découlera le raisonnement pour mettre en place les actions concrètes pour reprendre la route et se diriger vers ce sanctuaire qui l’appelle et guide ses pas. Nietzsche disait : « deviens ce que tu es ». C’est le « qui suis-je? » qui me permet de savoir « où vais-je? ». Mais c’est l’image de mon sanctuaire, de ce qui goûte bon dans ma vie, de ce qui oxygène ma flamme, qui m’aide à identifier qui je suis vraiment.
Tout objet, tout corps a sa propre fréquence de résonance. Il y a résonance lorsqu’un élément par simple vibration anime un autre élément qui possède une fréquence similaire. Sur un instrument de musique à cordes, les cordes sympathiques sont des cordes libres, sur lesquelles on n’exerce aucune action, mais qui entrent en vibration par simple résonance — par sympathie — avec les notes jouées de même fréquence. C’est dans cette vibration sympathique entre le monde extérieur et son être que le pèlerin trouve sa voie. Guidez vos pas : Demandez-vous ce qui est dans vos cordes?
Brigitte Harouni