Ann Sieben, une pèlerine pas ordinaire!

2016-02-03 5 Par Brigitte et Eric
La pèlerine d’hiver plus grande que nature!
Pour vous remettre en contexte, le 1er novembre dernier, Bottes et Vélo a été contacté par Ann Sieben. Cette dame de 52 ans nous annonçait alors qu’elle allait entreprendre un pèlerinage de 4000 km entre Denver et Ste-Anne-de-Beaupré. Nous ne pouvions qu’applaudir une telle entreprise. Nous nous sommes donc empressés de lui dire que Bottes et Vélo serait plus qu’heureux de l’accueillir lors de son arrivée à la Basilique Ste-Anne et de l’héberger. Étant membre dEphatta, cela allait de soi!

Ann Sieben - en raquetteDepuis ce jour, nous avons eu le temps d’échanger quelques courriels pour apprendre à nous connaître. Et plus nous en apprenions sur Ann Sieben, plus nous étions emballés par cette femme qui avançait, beau temps, mauvais temps, vers le Canada. Plusieurs diront: par chance ce n’est pas un gros hiver! Elle l’aurait préféré autrement. La neige s’étant faite tardive, elle a dû transporter ses bottes d’hiver dans son sac à dos, ce qui l’alourdissait passablement…

Malgré ce poids en surplus, le 10 janvier dernier, nous vous avons annoncé qu’elle était enfin arrivée en sol canadien et qu’elle se dirigeait vers le sanctuaire de Midland, en Ontario. Actuellement, elle marche en direction d’Ottawa. Dans son dernier courriel, elle nous écrivait être en avance de 10 jours sur son programme. Ayant l’intention d’arriver seulement pour Pâques à la Basilique Ste-Anne, elle nous a demandé de lui proposer un itinéraire qui passerait par l’Ermitage St-Antoine de Lac-Bouchette. Nous travaillons actuellement sur ce projet, mais nous vous annonçons déjà qu’Ann franchira les portes des 5 Sanctuaires Nationaux du Québec!

Le projet d’Ann Sieben dépasse tout ce que nous avions imaginé. C’est pourquoi nous lui avons demandé de nous partager ce qu’elle poursuit à travers tous ses grands pèlerinages. Voici donc les réponses qu’elle nous a transmises lors d’une halte le 30 janvier dernier, suite à notre courriel plein de questions :

[À l’intérieur de cet échange, découvrez différentes entrevues données par Ann Sieben. La première est une entrevue à la télé mexicaine (en espagnol) lors de son pèlerinage Denver-Mexico (2011). L’autre est une entrevue (en anglais) où elle nous partage sa vision du pèlerinage et comment elle perçoit le rôle social du pèlerin (2015). Ann parle français, nous n’avons cependant aucune entrevue d’elle en français. Cela viendra…]


Bottes et Vélo a quelques questions à vous poser. Plusieurs de nos lecteurs, tout comme nous, veulent en savoir un peu plus à votre sujet et sur ce long pèlerinage que vous avez entrepris.

B&V    D’abord, pourquoi un pèlerinage de Denver à Ste-Anne-de-Beaupré?

Ann Cette année, au lieu de partir loin à l’étranger, j’ai choisi de faire un pèlerinage local aux États-Unis et au Canada. Ste-Anne-de-Beaupré est une destination et un sanctuaire important. J’ai visité plusieurs autres sanctuaires depuis mon départ : Notre-Dame-de-Gadalupe (La Crosse, Wisconsin), Holy Hill (Erin, Wisconsin), Notre-Dame-du-Bon-Secours (Green Bay, Wisconsin), le sanctuaire des Martyrs (Midland, Ontario); et je me dirige vers d’autres encore avant d’arriver à Beaupré pour la veillée pascale (si Dieu le veut).

B&V  Vous dites « cette année », vous n’en êtes pas à votre premier long pèlerinage d’hiver. Combien de pays avez-vous parcourus et pourquoi faites-vous tous ces pèlerinages?

Ann Depuis 9 ans maintenant, je me consacre au pèlerinage et j’ai marché à travers 44 pays simplement pour rencontrer les gens là où ils vivent – comment peut-on « aimer son prochain comme soi-même » sans partir à la rencontre de ce prochain? Pour moi, être une servante pèlerine est une vocation. J’ai été appelée à cette vie. Je démontre ma foi; je bâtis de la confiance auprès des étrangers. Je ne suis pas appelée à évangéliser.

B&V Comment vous débrouillez-vous sur les chemins de pèlerinage? Cela ne vous effraie-t-il pas de voyager seule sur d’aussi longues distances?

Ann Je suis débrouillarde, peu importe les défis. Je vis au présent et dans l’instant même. J’apprends assez de chaque langue pour avoir au moins une conversation de base. Je suis contente de dormir dans un portique d’église ou dans une maison familiale, peu importe l’endroit, tant qu’il y a un peu de chaleur. Je ne dors pas à la belle étoile. Je ne m’inquiète jamais; il y a toujours une solution. J’ai beaucoup d’expérience. Je n’ai jamais craint pour ma vie, ni à cause des animaux sauvages, ni à cause de personnes mal intentionnées. Je ne me perdrai pas. Je sais ce que je fais – « prudente comme un serpent et simple comme une colombe ».

B&V   Nous avons appris que vous aviez fait officialiser votre démarche. Qu’en est-il exactement?

Ann  Je porte une crédenciale, signée et étampée par l’Archevêché de Denver, et validée chaque soir par mon hôte, que ce soit un prêtre, un pasteur protestant, une famille, peu importe.

B&V  Parlez-nous de votre foi. À quelle dénomination chrétienne appartenez-vous?

Ann  Je suis une catholique pratiquante, en voie de devenir une pèlerine consacrée (ce qui est sans précédent). C’est une vie consacrée à la foi – foi en Dieu, foi en l’humanité et foi en moi.
J’ai fondé une association publique de fidèles chrétiens (droit Canon 298) dans le diocèse de Denver (Colorado, États-Unis) appelée la Société des Pèlerins Servants « the Society of Servant Pilgrims », ayant pour mission pèlerine de marcher de village en village sur les chemins d’époque vers des destinations significatives, dans le but de rencontrer nos voisins du monde et bâtir la confiance, fondement de la paix.

B&V  Pourquoi faire vos pèlerinages durant l’hiver? N’est-ce pas plus difficile?

Ann  Je préfère marcher durant l’hiver : les arbres sont dépouillés de leurs feuilles et les champs sont fauchés. Je peux donc voir plus loin que durant les autres saisons; avec le gel, tout est propre, pas de boue ni de poussière; je peux toujours ajouter des couches de vêtements s’il fait trop froid; il n’y a pas de serpents, ni de moustiques; les rivières et les étangs sont gelés, et ne sont plus des barrières ou des obstacles; les gens sont généralement à la maison, accueillants et tranquilles, donc plus particulièrement ouverts à accommoder une pèlerine passant par là; plus il fait froid, plus je marche vite; plus je porte de vêtements, moins mon sac à dos pèse lourd. Je suis plus une athlète d’hiver qu’une athlète d’été. De plus, l’hiver me motive plus à parler avec les habitants de la place, car je suis définitivement motivée à ne pas me retrouver à dormir à la belle étoile.

B&V  Comment se déroulent vos journées de pèlerinage?

Ann  Durant chaque jour de marche – avec une moyenne de 40km/jour – je suis habituellement seule dans la nature, évitant les routes pavées autant que possible, (ici en Ontario, je passe la majeure partie de mon temps dans les bois, cheminant sur des sentiers couverts de neige et sur les pistes de motoneiges) et lorsque le soleil commence à descendre, je pars à la rencontre des gens dans les communautés – une paroisse, un centre communautaire, une résidence privée, tout ce qui croise ma route – pour demander le gite.

B&V  Comment pouvez-vous vous permettre de voyager aussi longtemps sans travailler?

Ann  Je suis une pèlerine mendiante, ce qui veut dire que je ne porte avec moi rien qui n’ait de valeur – pas de cellulaire, pas de caméra, pas d’appareil de GPS, pas de bijou, pas d’argent, etc. – et je dois donc de ce fait entrer en relation avec une communauté d’individus chaque soir pour trouver une place où dormir, et par le fait même, demander pour avoir quelque chose à manger pour le souper et le déjeuner du lendemain matin.
Lorsque je me prépare à partir en pèlerinage ou que j’en termine un, j’accepte des dons pour couvrir mes frais de transport. Pendant mon pèlerinage, je n’aime pas avoir d’argent du tout – l’argent change les relations interpersonnelles; l’argent accable l’esprit; et l’argent – et toute possession – doit être protégé. Je suis une petite femme de 52 ans… pas totalement sans défense, mais difficilement une menace pour qui que ce soit.

B&V  Que faites-vous lorsque vous n’êtes pas sur la route?

Ann Entre deux pèlerinages, qui durent 6 mois ou plus chaque année, je consacre mon temps à aider d’autres pèlerins, à parler de pèlerinage et à vivre une vie religieuse dévouée.

B&V  Comment s’annonce la suite de votre pèlerinage actuel?

Ann J’ai de l’avance sur mon horaire – le temps étant doux, j’ai retourné mes bottes d’hiver aujourd’hui – j’ai atteint le sanctuaire des Martyrs (Midland, Ontario) 10 jours plus tôt que je l’avais prévu. Je vais marcher le sentier de pèlerinage qui traverse Orillia et Barrie, puis je vais me diriger au nord-est, vers Pembroke, puis sud-est vers Ottawa.

B&V  En terminant, comment envisagez-vous votre vie de pèlerine?

Ann  Malgré les sacrifices, les difficultés et les dangers, j’aime cette vie et je vais continuer de vivre ainsi pour le reste de mes jours.

B&V  Merci Mme Sieben! On vous souhaite bonne route et nous vous attendons avec impatience!

Ann  Cheers!


Bottes et Vélo vous invite donc à suivre le périple d’Ann Sieben. Différentes activités seront prévues pour l’accueillir et marcher avec elle en direction des 5 sanctuaires nationaux du Québec. Dès que le calendrier du parcours québécois sera fixé, nous vous le ferons connaître et nous vous inviterons à vous joindre à nous. Le pèlerinage d’Ann Sieben: un événement sans précédent dans l’histoire du pèlerinage nord-américain.Bottes et Vélo - Emblême

Éric Laliberté et Brigitte Harouni

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